Murena, la BD de Jean Dufaux (scénariste) et Philippe Delaby (dessinateur) fait actuellement "un malheur" aux éditions Dargaud Benelux. De quoi
s'agit-il ? D'une vie de Néron vu par un de ses courtisans, Lucius Murena. Elle a fait l'objet d'une première série de quatre albums - parus respectivement en 1997, 1999, 2001 et 2002 - intitulée
"Le Cycle de la Mère" et dédiée à Agrippine. Un second cycle de quatre albums est annoncé, "Le Cycle de l'Epouse", voué à Poppée cette fois (le premier album est prévu en 2004).
Il convient de préciser que le scénariste Jean Dufaux n'en était pas à son coup d'essai ayant, avec la complicité du dessinateur Xavier Musquera, précédemment donné le jour à un Sourire de la
Murène (éd. des Archers, 1986) dont le héros était déjà Lucius Murena, et dont l'action se déroulait en 65. Une suite annoncée, L'homme au masque d'or, ne parut pas.
Scénariste de grand talent, Dufaux avait déjà traité de différentes tranches d'Histoire comme la dépression liée au crach boursier dans les années 1930 aux Etats-Unis (Dixie Road),
l'époque de la Comedia à Venise (Giacomo C.) ou la France de Napoléon III (Les Voleurs d'Empires)…
Cette nouvelle saga raconte le règne de Néron vu par les yeux d'un personnage de fiction, ami de l'empereur. Lucius Murena nous est présenté comme étant le fils de Lollia Paulina qui, elle, a réellement existé puisqu'elle fut quelques mois mariée avec Caligula, puis - comme le rappelle la BD - faillit épouser l'empereur Claude (nous y reviendrons).
La pourpre et l'or (1997) se passe en 54 et raconte la mort de Claude et celle de Lollia Paulina ; De sable et de sang La meilleure des mères (2001), l'intrigante Agrippine complote pour obtenir de Néron la condamnation à mort de Domitia Lepida (qui l'a élevé tout petit, pendant l'exil de sa mère sous Caligula), puis lui fait rencontrer Poppée ; Ceux qui vont mourir (2002), enfin, verra Néron ordonner l'inévitable matricide (58-59). (1999) introduit le personnage d'Acté et voit mourir Britannicus ; dans
Au contraire, chez Dufaux et Delaby la reconstitution de Rome, où se confine l'action, est soignée et plausible. Toutefois, les protagonistes de l'histoire y ont le premier rôle, et, sans cesse en action, sont plus importants que les comparses fictifs. On est loin de la distanciation brechtienne chère au cinéaste V. Cottafavi (La rivolta dei gladiatori, 1958 ; Le legioni di Cleopatra, 1959 et Messalina, Venere Imperatrice, 1959), dont Martin a si bien assimilé la leçon sans pour autant connaître quoi que ce soit aux péplums de Cinecittà ! Il est toujours plus difficile d'animer des personnages historiques, de les faire agir et parler, de penser à leur place - au contraire des personnages fictifs, à qui l'on peut faire dire ce que l'on veut et même leur prêter des sentiments ou une sensibilité anachronique puisque leur regard est toujours un peu le nôtre.
Au contraire de J. Martin, justement, les auteurs de "Murena" font grand cas des péplums. En particulier Spartacus de Kubrick (dont le générique inspire leurs couvertures) et Gladiator de Ridley Scott auquel ils ont du reste consacré une superbe lithographie. Chose agréable chez Dufaux & Delaby : leur humilité… Des notes en fin d'album, un glossaire, des références bibliographiques. Dans un dossier récent, publié en supplément par le magazine des éditions Dargaud, Avant-Première (n° 17, septembre 2002), à l'occasion de la sortie du quatrième album, les auteurs expliquent leur façon de travailler, leurs problèmes, les erreurs ou anachronismes qu'ils n'ont pu éviter, comme la longueur des tuniques ou la nudité des gladiateurs.
Parlons en justement, de la nudité des gladiateurs. Les Romains étaient beaucoup plus pudiques que les Grecs. Quelque part dans son roman (dont fut tiré le film de Kubrick), Howard Fast écrit que les gladiateurs combattaient nus. D'où sans doute les panoplies réduites à l'extrême des gladiateurs dans le film de Stanley Kubrick qui, tout de même, les affubla d'un pagne à l'écran, décence oblige dans les '60 ! C'est peut-être pour l'avoir lu que, dès les premières planches du premier album, Delaby campa ses gladiateurs rigoureusement dans la simplicité de leur naissance. Quel contraste avec Alix de J. Martin et la beauté statuaire de ses gladiateurs (dans Les légions perdues, p. ex.), que la rude virilté de ces bouchers aux trognes patibulaires, qui d'entrée de jeu éclaboussent d'hémoglobine le lecteur. Prix Staline, inscrit sur les listes noires du maccarthysme, Howard Fast était un écrivain de science-fiction avant d'être un auteur de romans historiques, ce qui lui permettait des écarts surréalistes comme d'affirmer que, dans leur rapacité, les Romains trouvèrent un ultime moyen de tirer profit de ces esclaves que, perte sèche, ils avaient été obligés de massacrer : ils utilisèrent leur chair pour en faire des saucisses qu'ils revendirent en Gaule et en Egypte ! Saisissante métaphore de l'écrivain communiste, surtout si l'on veut bien se souvenir que le sang encore chaud d'un gladiateur égorgé passait pour être un remède à l'épilepsie (Pline).
Résumé :
Rome, trois jours avant les ides d'Octobre. L'empereur Claude est mort, empoisonné par sa femme Agrippine, alors qu'il voulait la répudier pour épouser Lolia Paulina, mère de Murena.
Néron, fils d'Agrippine, devient empereur. Sa mère lui ayant acheté les faveurs de l'armée et du sénat, elle croit pouvoir gouverner. Mais à dix-sept ans, Néron n'est déjà plus un enfant, et elle va l'apprendre à ses dépens.
Britannicus, fils de Claude, a été écarté du pouvoir. Mais Pallas, pour se venger de Néron qui lui a enlevé Acté, son esclave préférée, remet à Britannicus un parchemin qui peut changer la face du monde : l'acte de répudiation marqué du sceau de son père, qui élimine Néron de la succession. Pendant ce temps, Murena recherche les assassins de sa mère tandis que Néron s'arrange pour régler le problème Britannicus.
Un dessin réaliste très fouillé, un scénario qui restitue trait pour trait l'histoire de Rome (à quelques détails près, puisqu'on n'a jamais retrouvé le testament de Claude) dans toute sa violence, mettant en scène des acteurs qui, dévorés par la cupidité et le goût du pouvoir, accumulent cruautés, crimes et trahisons sans la moindre scrupule.
Résumé :
Rome, trois jours avant les ides d'Octobre. L'empereur Claude est mort, empoisonné par sa femme Agrippine, alors qu'il voulait la répudier pour épouser Lolia Paulina, mère de Murena.
Néron, fils d'Agrippine, devient empereur. Sa mère lui ayant acheté les faveurs de l'armée et du sénat, elle croit pouvoir gouverner. Mais à dix-sept ans, Néron n'est déjà plus un enfant, et elle va l'apprendre à ses dépens.
Britannicus, fils de Claude, a été écarté du pouvoir. Mais Pallas, pour se venger de Néron qui lui a enlevé Acté, son esclave préférée, remet à Britannicus un parchemin qui peut changer la face du monde : l'acte de répudiation marqué du sceau de son père, qui élimine Néron de la succession. Pendant ce temps, Murena recherche les assassins de sa mère tandis que Néron s'arrange pour régler le problème Britannicus.
Un dessin réaliste très fouillé, un scénario qui restitue trait pour trait l'histoire de Rome (à quelques détails près, puisqu'on n'a jamais retrouvé le testament de Claude) dans toute sa violence, mettant en scène des acteurs qui, dévorés par la cupidité et le goût du pouvoir, accumulent cruautés, crimes et trahisons sans la moindre scrupule.
Résumé :
Britannicus est mort comme son père, l’empereur Claude. Empoisonné. Le testament qui aurait pu mettre fin aux ambitions de Néron n’est plus que cendres. Néron reste seul sur le trône de Rome.
Seul ? Enfin presque. Dans l’ombre, sa mère, Agrippine, seconde épouse de l’empereur, a bien l’intention de faire ce qu’il faut pour " mordre à ce fruit pourri qu’est le pouvoir. "
Le corps de Britannicus enduit de plâtre finit à peine de brûler sur un bûcher battu par la pluie que la lutte pour le pouvoir reprend de plus belle.
Néron apprend de Locuste l’empoisonneuse comment Agrippine a fait assassiner Claude. Il la prend à son service. Agrippine riposte en faisant empoisonner l’empoisonneuse.
Néron se sent si seul qu’il appelle auprès de lui sa tante, Domitia Lepida, bête noire de l’impératrice. Agrippine riposte en obligeant son fils à signer lui-même la condamnation à mort de
Domitia.
Résumé :
Rome, an 58. L’ombre des crucifiés s’étend sur l’empire tandis que tout Rome bruisse de rumeurs. Néron, le nouvel empereur aurait fait empoisonner son demi-frère, Britannicus. Agrippine, pour
rentrer en faveur auprès de son fils serait prête à lui ouvrir sa couche.
Néron n’aurait de pensées que pour Acté, la belle prostituée qu’il a arrachée à Pallas l’affranchi. Au palais justement, Néron charge Acté d’annoncer à Murena qu’il est pardonné et que rien ne
s’oppose à son retour à Rome. Murena ne demande que ça, mais exige de son souverain la tête de Draxus, l’assassin de sa mère. Draxus qui a commis ce meurtre à la demande d’Agrippine…
Néron imagine alors un plan machiavélique qui doit aboutir à la mort d’Agrippine. Il propose à sa mère de faire combattre Draxus contre un gladiateur choisi par
Murena.
Si Draxus gagne, la garde prétorienne qui veille jour et nuit sur la mère de l’empereur sera doublée. Si Draxus perd, la garde prétorienne sera supprimée. "
Résumé :
Le cycle de la mère se termine, les auteurs entament celui de l'épouse. Poppée est la nouvelle favorite de Néron. Son âme est aussi noire que celle d'Agrippine, la mère de Néron. Celui-ci,
encensé par un entourage malsain faisant de lui un dieu, est lentement poussé vers la folie.
Ce dieu se fera battre à la course de chars par une étrange femme masquée. Lutte des pouvoirs, manipulations perverses, intrigues de palais d'un côté… amour de l'autre: Acté, l'ancienne prostituée, oublie l'empereur dans les bras de son nouvel amour: Lucius Murena.
Dans cet album, les auteurs sondent les tréfonds de l'âme humaine et laissent peu de répit au bonheur. À peine le héros rencontre-t-il l'amour que déjà, on pressent
qu'il va lui échapper.
De par la volonté de Néron et surtout celle de son âme damnée, Poppée.
Résumé :
Massam, l’esclave chargé des basses oeuvres de l’impératrice Poppée, a reçu l’ordre d’exterminer le gladiateur Balba, l’ami de Lucius Murena, et sa compagne Evix qui osa vaincre Néron à la course
de chars. Déterminés à venger l’assassinat de Britannicus, ils sont considérés comme de dangereux ennemis de l’empereur. Les deux colosses finissent par s’affronter …
Au palais impérial, tandis que Néron projette de construire une Rome nouvelle, Poppée se prélasse en compagnie de ses suivantes. L’une de ses plus intimes, Arsilia,
est invitée à rejoindre secrètement le poète Pétrone dans un quartier populaire de la ville. Elle s’y retrouve en présence de Murena dont elle s’était éprise au temps où celui-ci était l’un des
proches de l’empereur.
Murena est persuadé qu’Arsilia est complice de l’enlèvement de la seule femme qu’il aime et qu’elle sait où elle a été emmenée. Toujours aussi éperdument épris et résolu à retrouver son aimée,
Murena décide ainsi de partir en Gaule à sa recherche…
http://www.bedetheque.com/serie-402-BD-Murena.html
sources: http://www.peplums.info/pep01a.htm
http://www.peplums.info/pep54g.htm
http://www.dargaud.com/Murena/cycle-mere.html
Scénariste
Original, à l’écart des modes, plus complexe qu’il n’y paraît, l’univers de Jean Dufaux s’orchestre autour de quelques thèmes récurrents : le pouvoir et la folie,
la solitude et ses miroirs, les égarements du temps, les blessures du passé. Cette mosaïque immense qui n’exclut ni les jubilations du roman-feuilleton, ni les ellipses cinématographiques, se
veut avant tout une œuvre de plaisir, d’enchantement aux sens féerique et occulte du terme.
Vendue à des centaines de milliers d’exemplaires, traduite dans une douzaine de langues, elle déploie ses sortilèges en se basant sur le talent graphique des meilleurs dessinateurs et un art du
dialogue qui épouse et repousse l’image dans un même mouvement.
Dessinateur
Ses premières planches paraissent en 1987 dans le Journal Tintin dans le genre qu’il apprécie le plus : l’histoire. Passion récompensée puisqu’il reçoit, avec Yves Duval, en mars 94, le prix " Clio " pour son album Richard Coeur de Lion, décerné par le Salon de l’Histoire de Paris. Il a déjà publié au Lombard les albums suivants : Richard Coeur de Lion et Arthur au Royaume de l'impossible sur scénario de Yves Duval, Bran, sur scénario de J.L. Vernal.
Avec la saga de l'Etoile polaire, sur scénario de Luc Delisse, qui compte déjà trois titres au Lombard, il impose un style et confirme sa maturité.