Il a été retrouvé, à Saintes, des "allumettes" datées du IIe siècle. Ce sont de petits bâtonnets de bois carbonisés à une extrémité. On ne sait pas si ces "allumettes" servaient simplement à transporter une flamme, à éclairer, ou participaient à la production du feu.
On a connaissance, dès le VIe siècle, en Chine, de bâtonnets de pin imprégnés de soufre, qui auraient eu le même usage.
Contrairement aux allumettes actuelles, ces allumettes au soufre ne peuvent s'enflammer que secondairement, au contact d'une braise préalablement obtenue par les moyens classiques (briquet d'acier, par exemple, déjà connu des Romains).
L'utilisation de ces allumettes au soufre est très bien décrite dans un poème de Saint-Amand (1594-1661):
« Souvent tout en sueur je m'esveille en parlant,
Je saute hors du lit, l'estomach pantelant,
Vay prendre mon fuzil, et d'une main tremblante
Heurtant contre le fer la pierre estincelante,
Après m'estre donné maint coup dessus les dois,
Après qu'entre les dents j'ay juré mille fois,
Une pointe de feu tombe et court dans la meiche,
R'avivant aussi-tost cette matiere seiche,
J'y porte l'allumette, et n'osant respirer
De crainte de l'odeur qui m'en fait retirer,
Au travers de ce feu puant, bleuastre et sombre,
J'entrevoy cheminer la figure d'une ombre... »
À la lecture de ce passage, on imagine bien le problème d'arriver dans le noir complet au sortir d'un cauchemar, à battre le briquet (nommé fusil avant le XVIIIe siècle), allumer l'amadou, allumer l'allumette au soufre (qui brûle avec une flamme bleue) pour pouvoir enfin allumer une bougie.
Ce n'est qu'au début du XIXe siècle que l'on verra pour la première fois une allumette produire une flamme en un seul temps, par réaction chimique ou par frottement.
L'allumette moderne a été inventée en 1805 par K. Chancel, assistant du professeur L.J. Thénard à Paris. Le mélange inflammable contenait du chlorate de potassium, du soufre, du sucre et du caoutchouc. Il s'enflammait lorsqu'il était plongé dans un petit flacon d'amiante rempli d'acide sulfurique. Cette sorte d'allumette, aussi onéreuse que dangereuse, ne rencontra pas un grand succès.
La première allumette inflammable par friction est l'invention du chimiste anglais John Walker en 1827. Il reprit des travaux infructueux menés par Robert Boyle, en 1680, sur l'utilisation du phosphore et du soufre. Walker mit au point un mélange de sulfure d'antimoine , de chlorate de potassium, gomme et d'amidon, qui pouvait s'enflammer en frottant sur une surface rugueuse. Les premières allumettes, brevetées par Samuel Jones, furent commercialisées sous le nom de lucifers. Elles présentaient d'importants défauts, la flamme étant instable et la réaction trop violente. De plus, l'odeur qu'elles produisaient était désagréable. Malgré ces difficultés d'utilisation, on considère que ces premières allumettes contribuèrent à l'augmentation du nombre de fumeurs.
En 1831, le français Charles Sauria ajouta du phosphore blanc afin d'atténuer l'odeur. Ces nouvelles allumettes, qui devaient être conservées dans une boîte hermétique, gagnèrent en popularité. L'allemand Jakob Friedrich Kammerer1832. Malheureusement, ceux qui travaillaient à leur fabrication furent atteints par des maladies osseuses, en particulier au niveau des mâchoires, liées à l'exposition au phosphore blanc. Après une campagne dénonçant ces pratiques, qui menaient à des infirmités graves, défigurantes et parfois mortelles, des actions législatives contraignirent l'industrie à changer de méthode et à protéger les ouvriers.
L'allumette de sûreté, encore appelée « allumette suédoise » en raison de la nationalité suédoise de son inventeur Gustaf Erik Pasch, date de 1844. La « sûreté » provient du fait qu'elle nécessite un grattoir spécial, dont les éléments chimiques interagissent avec ceux de l'extrémité de l'allumette pour s'enflammer. Le grattoir est composé de poudre de verre et de phosphore rouge, tandis que l'extrémité de l'allumette est enduite de sulfure d’antimoine, de dioxyde de manganèse et de chlorate de potassium. La chaleur engendrée par le frottement transforme le phosphore rouge en phosphore blanc, qui à son tour contribue à l'inflammation de l'allumette. Une société américaine développa un procédé similaire et le breveta en 1910.
Complément
Il faut attendre le début du XIXe siècle pour qu’on découvre enfin le principe véritable des allumettes. Le Français Chancel invente les allumettes oxygénées. En 1816, s’inspirant de sa découverte, le français Desrone invente l’allumette au phosphore.
C’est à un anglais, Walker, que nous devons l’allumette à friction, dont la tête s’enflamme par simple frottement sur du papier de verre. Mais ses allumettes restent dangereuses et c’est le français Sauria qui peut être considéré comme l’un des inventeurs des allumettes à friction véritablement utilisables.
Des "viennoises" aux "suédoises"...
Dès 1832, on vend à Paris des allumettes dites « pyrogènes ». Très vite, après 1833, les allumettes au phosphore d’Outre-Rhin acquièrent la réputation d’être les meilleures. La vogue des « allumettes viennoises » va grandissant, malgré le danger qu’elles représentent car elles s’enflamment trop facilement. En 1845, le chimiste autrichien Schrötter transforme le phosphore blanc en phosphore rouge, ce qui le rend inoffensif. Les suédois, au même moment, imaginent de préparer deux pâtes, l’une pour l’allumette, l’autre pour le phosphore.
Les « allumettes de sûreté » ou « allumettes suédoises » sont nées.
Le bois qu'on emploie de préférence pour faire les allumettes est celui du hêtre, du tremble ou du sapin. 0n prend des bûches bien droites, et, autant que possible, exemptes de noeuds; on enlève l'écorce, et on fait sécher dans une étuve chauffée à 210 ou 220° par un four de boulanger où l'on brûle des rognures de bois sec La dessiccation, pour être complète, exige un chauffage prolongé pendant environ l5 heures, mais qu'il faut ralentir après les trois premières heures, pour éviter que les bûches ne prennent feu.
On scie ensuite [es bûches en cylindres ayant chacun de 6, 8 à 10 centimètres de hauteur, qu'on équarrit, puis qu'on divise, à l'aide d'un couteau articulé, sur un billot (comme ceux dont les boulangers se servent pour couper le pain), en planchettes parallèles taillées dans le sens des fibres du bois. Ces planchettes elles-mêmes sont hachées avec le même instrument en petits prismes très allongés.
On peut avec autant de facilité préparer les allumettes cylindriques ; pour cela, on se sert d'un rabot dont le fer est armé de cinq lames circulaires horizontales ; on le fait jouer sur des bûches sèches et équarries, dans le sens des fibres, et à chaque coup on enlève cinq petites baguettes cylindriques, qui, réunies en bottes, sont ensuite partagées par un couteau mécanique qui de chacune en fait quatorze à vingt et une, suivant la longueur qu'elles avaient d'abord et celle qu'on veut donner aux allumettes.
Dans beaucoup de pays, et notamment dans plusieurs de nos départements, au lieu de hacher du bois pour en faire des allumettes, on prend pour cela des tiges de chanvre séchées qui donnent de belles allumettes cylindriques et creuses, brûlant très bien Dans tous les cas, et quelle que soit, du reste, la matière première employée, les allumettes qu'on destine à être seulement soufrées sont réunies en bottes de deux à trois mille, serrées ensemble à l'aide d'une ficelle, et trempées de 1/2 à 1 centimètre dans un bain de soufre fondu à 125 ou 130 degrés, et maintenu toujours à cette température. On a soin, en les retirant aussitôt, de les secouer pour faire retomber dans la chaudière l'excédent de soufre. Celui qui reste adhérent est bientôt solidifié, et les allumettes peuvent alors être livrées aux consommateurs.
- On ne sait rien de bien précis sur l'origine et l'invention des allumettes chimiques; voici cependant ce que M. Ménigault nous apprend à ce sujet dans un article publié par le Nouveau Journal des connaissances utiles ( janvier 1854) .
(Cependant il résulte dés recherches de Leuchs, consignées dans un article de Nicklés (Annales du génie civil), que cet inventeur s'appelait Jacques-Frèdèric Kammer, né à Emmingen, dans le Wurtemberg, eu 1796, et mort, en 1857, dans un asile d'aliénés de Ludwigsburg. Les premières allumettes chimiques allemandes ne contenaient pas de phosphore. La partie inflammable était formée d'une partie de chlorate de potasse et de 2 parties de sulfure d'antimoine formant une pâte avec de l'eau gommée.)
« Ces allumettes, dit M. Ménigault, qui ont laissé si loin derrière elles les briquets oxygénés et phosphoriques, sont, quoique inventées à Berlin, comme d'origine française : le commerce s'en fait principalement à Paris. C'est là que se fabriquent les matières élémentaires qui entrent dans leur composition, C'est là aussi qu'ont été confectionnées les premières allumettes. Voici comment et à quelle occasion.
« Un voyageur arrivait de Berlin à Paris, il y a une vingtaine d'années, avec quelques paquets d'allumettes. Comme ces allumettes étaient une nouveauté même pour la capitale de la France, notre homme conçut immédiatement tout le parti qu'on pouvait tirer de ce nouveau moyen de faire du feu ; en conséquence il s'adressa à un pharmacien pour en connaître la composition. Celui-ci le renseigna moyennant une somme de 400 francs comptants. Possesseur de la composition ignifére, notre homme se dirigea immédiatement sur Londres pour exploiter le secret que venait de lui révéler le pharmacien de Paris. Mais de son côté le pharmacien ne resta pas inactif, et bientôt les allumettes de Londres et de Paris se croisèrent sur les principaux marchés. Comme tous les avantages sont généralement dans l'actualité, il s'agissait de trouver un moyen pour empêcher le concurrent de réussir. A ce sujet, voilà ce qu'imagina l'un des deux antagonistes : le chlorate de potasse, base de cette composition, après avoir beaucoup haussé de prix, manqua presque. Le Parisien mit à profit cette circonstance. Sous un nom d'emprunt, il expédia à Londres et fit vendre à bas prix quelques barils de chlorate convenablement falsifié. L'Anglais acheta et continua à fabriquer; mais alors ses produits ne purent plus soutenir la concurrence, et tout l'avantage resta du côté de la France." L'avantage peut- être, ajoutons-nous, mais non l'honneur ; car si les choses se passèrent réellement ainsi, il se peut difficilement imaginer rien de plus déloyal que la manière d'agir du pharmacien de Paris, qui, non content d'avoir abusé de la confiance de l'ètranger, eut encore recours à la fraude pour triompher de son rival : - nous pourrions dire de sa victime... Mais laissons là le côté moral de cette affaire, et revenons au côté industriel et pratique, qui doit seul nous occuper, ici.
Le bois employé pour faire les allumettes chimiques est presque toujours le sapin du Nord ' On emploie également le sapin ordinaire, le pin, le tremble, le pin d'Écosse, le hêtre, le tilleul, le bouleau, le saule, le peuplier et le cèdre.. Dans l'opération de la taille, au lieu de hacher entièrement les petits blocs de bois de façon à isoler les baguettes les unes des autres, on laisse celles-ci adhérentes entre elles par la base, en arrêtant le couteau à 1 centimètre environ au-dessus du support. Quant aux allumettes cylindriques, qu'on ne peut faire autrement que de séparer tout à fait de la bûche, on les place verticalement dans des cases qui peuvent encontenir trente-deux rangées de quarante chacune, séparées les unes des autres par de petites lames en bois ou en carton doublées de drap. Toutes les allumettes sont ainsi disposées parallèlement, leurs extrémités sont toutes sur deux plans également parallèles, et les interstices ménagés à l'aide de règles en bois ou en carton permettent tant au soufre qu'à la composition dans laquelle on les immerge ensuite de pénétrer partout à une égale hauteur. Mais avant de garnir les allumettes on les porte, soit réunies en paquets, soit fixées et serrées dans les cadres, sur une plaque en fonte chaulée à 250°, pour achever de les dessécher. On les plonge ensuite jusqu'à une profondeur de 6 à 8 millimètres dans le bain de soufre, puis on les pose un instant seulement sur une table de marbre, où la préparation chimique est étendue sur une couche de 2 millimètres d'épaisseur.
Site et monument historiques
L’ancienne manufacture d'allumettes d'AubervilliersLa loi de 1810, relative aux manufactures et ateliers insalubres, incommodes ou dangereux, s’applique aux fabriques d’allumettes en raison des dangers d’incendie et d’explosion. Leur installation n’est autorisée, après un enquête publique dite commodo et incommodo, que dans des endroits éloignés de toute habitation particulière.
Les fabriques d’allumettes s’installent à Pantin et à Aubervilliers
Suite à cette loi, les fabricants d’allumettes parisiens cherchent des terrains isolés et peu chers dans les communes limitrophes de Paris. C’est ainsi
que s’installent trois fabriques d’allumettes à Pantin dans les années 1850, dont celle des sieurs Lancastets et Rimailho, située sur la route d’Aubervilliers (l’actuelle avenue
Edouard-Vaillant), et une à Aubervilliers, la fabrique Delabarre, au lieu-dit La Motte, rue du Vivier (actuelle rue Henri-Barbusse). La manufacture d’allumettes de Pantin présentait un
premier bâtiment donnant sur la rue et qui servait à loger une trentaine de membres du personnel, contremaîtres et ouvriers de la section des machines. Sur l’arrière se trouvaient les
ateliers. L’ensemble a été démoli au début des années soixante. Sur son site a été construit le groupe scolaire Jean-Lolive.
Celle d’Aubervilliers, entièrement reconstruite à partir de 1902, était située sur une parcelle « en lanières », comme ses voisines vouées à la culture maraîchère et aux arbres fruitiers. Sur un terrain clos de mur, d’une surface de 5000 mètres carrés, se trouvaient une maison d’habitation, une douzaine d’ateliers et des hangars. En 1872, cette fabrique d’allumettes emploie 80 personnes : 20 hommes, 20 femmes et ... 40 enfants ! La loi du 2 août 1872 institue la fabrication et la vente des allumettes chimiques en monopole d’Etat. Toutes les fabriques françaises sont expropriées. L’Etat choisit de confier l’exploitation de son monopole à une compagnie privée, moyennant une redevance sur la base d’une vente annuelle de 40 milliards d’allumettes. La Compagnie générale des Allumettes chimiques conserve une douzaine de sites de production parmi le millier existant sur l’ensemble du territoire français parmi lesquels le site des frères Rimailho à Pantin et celui de Madame Delabarre, à Aubervilliers, réunis en une seule direction. Pour compléter l’ensemble, la Compagnie achète une ancienne distillerie, à Pantin, entre la rue Sainte-Marguerite et la route de Flandre (actuelle avenue Jean-Jaurès) qu’elle transforme en siège pour l’ensemble des trois établissements. C’est le site le plus important de France puisqu’il s’y fabrique 13 milliards d’allumettes sur les 27 milliards de l’année 1887. |
sources: fr.wikipedia.org/wiki/Ivar_Kreuger
LIENS
La collection de boîtes d'allumettes s'appelle la philuménie
Je vous invite vivement à visiter le site "la boîte d'allumette" en cliquant sur la photo
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